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Histoire

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L’histoire garde le souvenir du rayonnement de Marienthal et de la diversité des milieux touchés par ce pèlerinage. Par sa place au carrefour de l’Europe, par le réconfort donné dans son enceinte, par la richesse de sa vie sacramentelle, avec la réconciliation et l’adoration eucharistique notamment, le sanctuaire constitue un centre d’expérience spirituelle aux multiples aspects. Ses différentes ressources ne sont d’ailleurs que le reflet des richesses de la personnalité de la Vierge Marie, “Mère de l’Église, Mère de miséricorde, Vierge comblée de Grâce et Reine du monde à venir”.

Jean-Paul II à l’occasion du centenaire de la basilique
(Lettre de Jean-Paul II – Rome, le 2 mai 1992 Signé : Angelo Card. Sodano, Secrétaire d’État)

 

 

XIIIe siècle : Albert de Haguenau, fondateur de « Mariæ in valle »

XIIIe siècle ! Un élan puissant de foi vivante fortifie la chrétienté. La vie monastique et érémitique connaît un nouvel essor. C’est à cette époque que le chevalier Albert de Haguenau se retire dans la Forêt de Haguenau.Il naît dans une famille proche du pouvoir d’alors. En effet, la parenté de sa mère occupe des fonctions de maréchaux de la Résidence Impériale de Haguenau et son père est membre du « Corps des Burgmänner ». Albert passe sa jeunesse au château impérial, connaissant à la fois l’éclat et la vanité de la cour.
Albert entend l’appel du Seigneur… « Viens suis-moi ! » Il quitte le château pour mener une vie d’ermite au bord du Rothbach. Il vénère, dans son ermitage, une statue de la Vierge en Majesté, tenant l’Enfant Jésus sur les genoux. Il avait découvert en Marie un modèle de simplicité, de pauvreté, d’abandon à la Providence et de confiance en Dieu. « Je suis la Servante du Seigneur ! »

C’est dans cette attitude qu’elle apparaît sur les plus anciens sceaux de Marienthal datés de 1290 ; une clé de voûte de la sacristie construite en 1519 (conservée dans son état d’origine), reproduit la même image.

Son exemple attire des disciples et, vers 1250, il entreprend la construction d’un couvent et d’une église pour sa petite communauté.

Pour assurer l’avenir de sa fondation, Albert demande à ses frères et sœurs, de lui céder les terres reçues en héritage de leur mère. En 1251, « ils déclarent avoir donné et consacré en l’honneur de la Bienheureuse Vierge Marie et en exécution de la volonté de leur mère, les biens qu’ils héritent à l’usage du couvent que leur frère Albert construit ».

Albert fait venir des moines du couvent des Guillelmites de Græfenthal en Sarre. Il meurt trois ans plus tard. Son provincial, le Père Lambertus, écrit, en faisant allusion au dynamisme de la nouvelle fondation : Albert a reçu « le couronnement de ses vertus et la récompense de ses travaux ».

Les origines de Marienthal sont donc humbles : il n’y a pas eu d’apparition céleste, mais un témoin, Albert de Haguenau, un homme qui a répondu à l’appel du Seigneur, à l’exemple de la Vierge Marie.

1257-1543 : une communauté de moines guillelmites dynamiques

Pendant trois siècles, les fils de saint Guillaume de Maleval (appelés guillelmites) restent fidèles à leur fondateur, représenté dans une clé de voûte de la sacristie.
Au XIIIe siècle, le couvent de Marienthal compte dix moines et fonde trois autres couvents guillelmites : un à Mühlbach en pays de Bade, un à Strasbourg et un à Haguenau. Ces fondations témoignent de la vitalité et de l’idéal guillelmites des moines de Marienthal, aussi connus comme moines zélés.

Toutes les belles sculptures que nous retrouvons aujourd’hui dans la basilique sont l’œuvre des guillelmites et démontrent leur sens artistique : le Christ au tombeau, la Dormition de la Vierge Marie, le relief de saint Guillaume, le relief du Lion et des Lionceaux et le buste de Dieu le Père bénissant le monde (ces deux derniers se trouvent sur le mur du chœur).

La sacristie voûtée, achevée en 1519, est entièrement conservée. Frédéric Hoffer, alors prieur de Marienthal, la fit construire et Frédéric Gottesheim en fut le bienfaiteur. Le sculpteur Fritz Hammer a fixé leurs bustes dans la pierre et leur fait porter le poids des voûtes.

Malheureusement Marienthal ne fut pas épargné par la guerre de Cent Ans.

Début du XVème siècle : origine des 2 statues de la Vierge.

Après les destructions du XIVe siècle et la profanation de la statue de la Vierge que vénéraient Albert de Haguenau et les pèlerins, celle-ci fut remplacée par la Vierge debout, portant l’Enfant Jésus sur les bras, conservée jusqu’à nos jours. « Notre-Dame de la Joie » appartient au groupe des « Belles Madones » du début du XVe siècle. Elle serait un don du margrave Bernard de Bade, protecteur de Marienthal . Vers la fin du XVe siècle, une autre statue s’ajoute à la première, une Pietà, Vierge Douloureuse, œuvre d’un artisan inconnu. Ses traits sont marqués d’un léger sourire et l’ensemble respire la sérénité. La dévotion populaire s’est spontanément portée sur cette Pietà, car elle correspondait davantage aux souffrances du peuple chrétien de ce temps.
Ces statues ont une longue histoire. En effet, elles durent être soustraites, à plusieurs reprises, aux brutalités des guerres. En 1525, lorsque les paysans révoltés ravagent la nouvelle église de Marienthal de style gothique flamboyant, construite entre 1460 et 1520, elles sont cachées une première fois à Haguenau.

La reconstruction de l’église s’avéra nécessaire car la foule des pèlerins et des pauvres qui affluaient à Marienthal devenait toujours plus importante.

Pendant trois siècles, les guillelmites se dévouent dans la « Vallée de Marie » comme en témoigne, au fond de l’actuelle basilique, une inscription taillée dans la pierre, datant de 1519, que fit graver le prieur Frédéric Hoffer, avant-dernier prieur guillelmite de Marienthal. Ainsi se vérifie le proverbe des guillelmites : « Si je veux travailler, je me fais moine à Marienthal ».

Fin du XVème siècle : le début des pèlerinages.

La renommée de la cité mariale passe les frontières. La foule des pèlerins augmente, l’invention de l’imprimerie permettant aux moines de faire connaître les bienfaits apportés par Notre-Dame et de stimuler la confiance des croyants. Vers la fin du XVe siècle est imprimée la première image du pèlerinage que les fidèles emportent comme précieux souvenir.

L’image représente Notre-Dame des Douleurs assise au pied de la croix avec le corps de Jésus. À droite se tient saint Guillaume, à gauche, un homme ligoté, représentant un commerçant de Seltz, assailli dans la forêt de Haguenau par des brigands. Elle porte l’inscription : « Ô Marie, à Mergendal, près de Haguenau, priez Dieu pour nous ».

1543-1617 : Marienthal sous l’administration de la ville de Haguenau.

Le prieur Hoffer ne se doutait certainement pas qu’Udalric Sturner, qui lui succéda en 1520, serait le dernier prieur de Marienthal. En effet ce dernier passa à la « Réforme », prit femme et vendit le couvent et tous ses biens à la ville de Haguenau qui conserva la jouissance de Marienthal dans la plus complète illégalité jusqu’en 1617. Mais la ville ne profita guère de ce bien mal acquis. Les pèlerins furent rebutés par l’irrégularité des offices et les dangers qu’il fallait braver pour s’y rendre.

1617-1765 : un pèlerinage florissant au temps des jésuites.

En 1617, les jésuites prennent en charge Marienthal et développent son influence en dépit de la persistance des guerres dévastatrices. Pendant celle de Trente Ans, Marienthal est mis à sac par les lansquenets du condottiere Mansfeld, puis par les Suédois. Chaque fois, les statues de Notre-Dame sont cachées par les fidèles.

XVIIIe siècle : Maria Leczinska, reine de France : sa dévotion à Notre-Dame de Marienthal.

Malgré les nouvelles et profondes dévastations, le XVIIIe siècle est particulièrement florissant à Marienthal. Seigneurs, comtes, évêques et prélats rivalisent de générosité dans leurs dons. Mais ce n’était rien comparé aux dons que valut à l’humble « Val de Marie » la ferveur de la famille royale de Pologne qui vécut à Wissembourg de 1720 à 1725 et y venait en pèlerinage plusieurs fois par an.

C’est à l’intercession de Notre-Dame de Marienthal que la fille du roi Stanislas Leczinski attribue le choix de Louis XV de l’épouser: devenue reine de France en 1725, Maria Leczinska ne cessa, jusqu’à sa mort en 1768, de témoigner sa fidélité au sanctuaire marial. Elle multiplia les présents – couronnes, manteaux, candélabres en or, ostensoir de vermeil, bijoux – et adressa des neuvaines à chaque nouvelle naissance royale.
La dévotion de la reine de France à la Reine du ciel transparaît dans les inscriptions qui ornaient deux couronnes d’or offertes à la Madone à l’enfant en 1727 : « Qu’il se taise, ô Vierge Bienheureuse, celui qui croit t’avoir invoquée sans être exaucé », « à Marie, Reine du Ciel et de la terre, Marie, la plus humble servante, a offert ce don, le 25 mars 1727 ».

La Révolution fit main basse sur ces munificences, à l’exception d’un grand ostensoir serti des diamants de fiançailles de la mère du roi Stanislas et du bouquet de la princesse Marie, ostensoir qui est aujourd’hui classé parmi les Trésors de France et encore utilisé lors des grandes fêtes.

Lorsqu’en 1765 un édit royal interdit les jésuites en France, Marienthal fut soumis par le roi Louis XV, le 7 mars 1766, aux ordres de l’évêque de Strasbourg qui confia le pèlerinage à cinq prêtres séculiers.

1789-1793 : des années de désolation.

Quand la constitution civile du clergé supprima tous les couvents et chapelles, c’est un pasteur protestant qui conduisit une délégation pour réclamer le maintien du pèlerinage de Marienthal. Il obtint gain de cause.

Cependant, le sanctuaire était officiellement desservi par un prêtre jureur qu’un peloton de 50 chasseurs à cheval avait escorté le jour de son arrivée. Forts du soutien de la population, les anciens vicaires « réfractaires » poursuivirent leur apostolat, non sans fustiger du haut de la chaire « l’apostat, l’intrus et le voleur » qui occupait timidement les lieux. Les choses se gâtèrent, en 1793, à l’arrivée massive des Jacobins qui interdirent l’accès de l’église en murant ses portes.

Mais les fidèles continuèrent à venir à Marienthal, malgré l’interdiction et ils priaient devant les portes murées.
Quant aux statues de la Vierge, elles demeurèrent cachées dans le couvent d’Ottersweier, Outre-Rhin, jusqu’au 31 juillet 1803.

XIXe : un siècle de gloire

Le XIXe siècle, réagissant contre le philosophisme et la Révolution, fut une grande époque mariale jalonnée, à Marienthal, par de grandes solennités telles que le sixième centenaire du pèlerinage, en 1825, la célébration du dogme de l’Immaculée Conception proclamé en 1854 et, surtout, le couronnement de la statue de Notre-Dame des Douleurs, qui attira plus de 10 000 pèlerins en septembre 1859. Dans le transept sud de l’église actuelle, une vaste fresque du peintre Feuerstein témoigne du faste de cette cérémonie.

Marienthal au XXe siècle.

Plusieurs fêtes jubilaires, marquant les premières décades du siècle, confirment la renommée du pèlerinage. Pendant la Première Guerre mondiale, Marienthal est une oasis de paix. Le sanctuaire est un refuge pour nombre de personnes accablées de soucis, surtout les soldats des casernes de Haguenau avant leur départ aux fronts.
De novembre 1916 à juin 1917, une jeune recrue séjourne à Haguenau, Joseph Engling, qui fait de ses pèlerinages aux Madones la plaque tournante de sa vie.

Il meurt sous la mitraille, à Cambrai, en 1918. Il est actuellement en instance de canonisation, ce qui draine de nombreux fils spirituels du mouvement de Schönstatt vers Marienthal. Une plaque apposée à la basilique commémore ce passage.

La guerre de 1939 à 1945 fut douloureuse pour la cité mariale. Les combats firent rage autour de la basilique, brisant tous les vitraux, criblant les murs, ébranlant le clocher. La Madone de la Joie trouva asile à Saint-Dié où elle échappa, comme par miracle, à la destruction, tandis que la Pietà resta sur place, associée aux souffrances de son peuple.

Le temps de l’après-guerre ramena de grandes foules auprès de Notre-Dame.

Marienthal, symbole de l’unité et de la réconciliation européennes.

La situation géographique de Marienthal, et son histoire, font de ce lieu marial un symbole de l’unité et de la réconciliation européennes.
Au cœur de la terre d’Alsace, premier pèlerinage marial de la province, Marienthal accueille de nombreux pèlerins venus d’Alsace, de Lorraine, mais aussi d’Allemagne, notamment des diocèses de Spire, de Trêves et de Fribourg.
Cette tradition date de la période pré-révolutionnaire où le diocèse de Strasbourg s’étendait de part et d’autre du Rhin.
Viennent aussi à Marienthal des pèlerins de toute la France ainsi que de Suisse, du Luxembourg, de Belgique, d’Autriche, de Pologne, de Slovaquie, de la République Tchèque, voire même de la lointaine Amérique !
Les pèlerins viennent prier Notre-Dame pour la paix, la réconciliation et l’unité dans les familles et entre les peuples. Marienthal est une terre bénie où depuis des siècles, et bien avant que les grands de ce monde ne parlent de construction européenne, s’est construite dans le cœur des hommes, une Europe fondée sur le pardon, la fraternité, la solidarité.

Le rôle maternel de Notre-Dame est de nous conduire à son Fils, selon la parole de l’Évangile :« Faites tout ce qu’il vous dira.